Chicoutimi, le 10 mai 2000

Communiqué de presse   

                                                       

3200 femmes locataires de Chicoutimi, Jonquière et

La Baie consacrent plus de 50 % de leur revenu en loyer

Plus de 3200 femmes locataires de la région métropolitaine de recensement Chicoutimi-Jonquière consacrent plus de la moitié de leur revenu en loyer. C’est ce qu’ont révélé aujourd’hui Loge m’entraide du Saguenay et le Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), lors d’une conférence de presse tenue à Chicoutimi, avec l’appui du Centre de femmes Mieux-Être de Jonquière. Les groupes ont précisé que la situation est particulièrement catastrophique dans la ville de Jonquière, représentée à l’Assemblée nationale par le premier ministre Lucien Bouchard. 

Selon les trois organismes, ce résultat embarrassant devrait convaincre le premier ministre de la pertinence de la demande de la Marche mondiale des femmes de l’an 2000 qui revendique un Grand chantier permettant le développement de 8000 nouveaux logements sociaux par année à l’échelle du Québec.

 

Un portrait inquiétant

C’est en préparation de cette Marche que le FRAPRU vient de publier une étude intitulée Logement au Québec: femme et pauvreté  et qu’il a entrepris une tournée des principales villes du Québec pour en  faire connaître les résultats.

De passage à Chicoutimi, Lucie Poirier, rédactrice du rapport, a d’abord affirmé que dans la région métropolitaine Chicoutimi-Jonquière qui comprend également la ville de La Baie, les ménages dont le principal soutien financier est une femme sont locataires dans une proportion de 59 %. Quand c’est un homme qui est le principal soutien financier, ce pourcentage n’est plus que de 29 %. À Chicoutimi même, ce sont 63 % des femmes qui sont locataires.

Selon Mme Poirier, «non seulement, les femmes ont-elles plus de possibilités de se retrouver locataires, mais elles courent davantage de risques d’être mal-logées». Ainsi, alors que les gouvernements estiment qu’un ménage qui consacre plus de 30 % de son revenu pour se loger a des besoins impérieux de logement, dans la RMR Chicoutimi-Jonquière, ce problème est vécu par 5780 ménages locataires dont le principal soutien financier est une femme. Il s’agit de 51 % de ces ménages. Dans le cas des hommes, ce pourcentage est de 33 %.

C’est cependant le nombre de femmes devant consacrer plus de la moitié de leur revenu en loyer qui alarme le plus les organismes sociaux. 3205 ménages locataires dont le principal soutien financier est une femme se retrouvent en effet dans cette situation scandaleuse qui les oblige à sabrer dans leurs autres besoins essentiels, dont la nourriture. Il s’agit de 28 % de ces ménages. Chez les hommes, ce pourcentage est de 20 %.

Dressant le portrait ville par ville, Mme Poirier a révélé que c’est à Jonquière où la situation est en proportion la plus désastreuse. 56 % des femmes locataires y paient plus de 30 % de leur revenu en loyer, alors que pour 31 % d’entre elles, c’est la moitié du revenu qui passe en loyer.

À Chicoutimi, 2570 femmes locataires paient plus de 30 % de leur revenu en loyer. Il s’agit de 47 % des femmes locataires. De ce nombre, 1450 femmes locataires engloutissent plus de la moitié de leur revenu pour le logement. Il s’agit de 27 % des femmes locataires.

Enfin, à La Baie, 46 % des femmes locataires paient plus que la norme de 30 % de leur revenu en loyer. Pour une femme locataire sur quatre (25 %), le loyer accapare plus de la moitié du revenu.

 

Pour un Grand chantier de logement social

Selon Sonia Côté coordonnatrice de Loge m’entraide, la pauvreté des femmes locataires est directement en cause. À Chicoutimi, elles ont un revenu annuel inférieur de 8000 $ à celui des hommes. À Jonquière, la différence monte à 10 000 $ et à La Baie à pas moins de 14 000 $!

Mme Côté croit cependant que le laissez-aller des gouvernements doit aussi être pointé du doigt, le gouvernement fédéral s’étant totalement retiré du financement de nouveaux logements sociaux depuis le 1er janvier 1994, alors que celui du Québec ne s’est engagé à financer que 1325 logements par année à l’échelle de la province, dont à peine 40 logements pour toute la région administrative du Saguenay-Lac-Saint-Jean.

Selon Mme Côté, c’est pour cette raison que l’une des revendications québécoises de la Marche mondiale des femmes de l’an 2000 est le financement annuel de 8000 logements de type HLM, coopératif ou sans but lucratif, à l’échelle du Québec. Loge m’entraide invite tous les groupes préoccupés par la pauvreté des femmes à appuyer cette demande et à participer aux activités de la Marche qui connaîtront leur point culminant en octobre prochain. 

Présente à la conférence de presse, Josée Gagnon du Centre de femmes Mieux-Être de Jonquière en a appelé directement au premier ministre Lucien Bouchard, en lui demandant de regarder la situation dans la ville même de Jonquière, qu’il représente à l’Assemblée nationale, s’il veut se convaincre du bien-fondé de cette revendication et des autres demandes de la Marche des femmes contre la pauvreté et la violence.  

Une locataire, qui vient d’avoir accès à un logement dans un HLM, Ginette Bouchard, a également témoigné de sa situation, en affirmant que son entrée dans un logement social, lui permet « enfin de voir la lumière au bout du tunnel ».  Elle a conclut en souhaitant que « bien d’autres femmes puissent aussi améliorer leur situation, en ayant droit à un logement social ».